En ce qui concerne la réalité du changement climatique, gagner la confiance des populations implique de nous reposer sur des explications éclairées, justifiées et reposant sur des données scientifiques fiables, a contrario des arguments d’autorité qui risquent de susciter, chez les sceptiques, une défiance néfaste et une irresponsabilité dangereuse.
Le réchauffement climatique est réel et causé par l’homme. C’est un fait. Nul être doué de raison ne peut le nier aujourd’hui. Il entraîne un changement climatique à grande échelle. Pourtant, sous couvert de « scepticisme » climatique, le public est bombardé d’informations erronées qui mettent en doute cette réalité ou le consensus scientifique au sujet de l’origine anthropique du changement climatique. L’objectif de cet article est simple : démystifier la désinformation sur le climat en présentant des données scientifiques fiables et vérifiées par des pairs.
1. L’activité solaire influence-t-elle le climat de notre planète ?
Un des « arguments » avancé par les climato-sceptiques est que l’activité solaire influence le climat mondial et provoque un réchauffement de la planète. Fake news ! Bien au contraire, au cours des 35 dernières années de réchauffement climatique, le soleil a montré une légère tendance au refroidissement. Le soleil et le climat ont évolué dans des directions opposées. La preuve par les faits.
En tant que fournisseur de la quasi-totalité de l’énergie de la Terre, le soleil a une forte influence sur le climat. Une comparaison entre le soleil et le climat au cours des 1 150 dernières années a montré que les températures correspondent étroitement à l’activité solaire (Ilya Usoskin, 2005). Cependant, après 1975, les températures ont augmenté tandis que l’activité solaire ne montrait que peu ou pas d’activité qui puisse expliquer ce réchauffement. Cela a conduit les auteurs de l’étude d’Usoskin à conclure : « Au cours de ces 30 dernières années, l’irradiation solaire totale, l’irradiation solaire UV et le flux de rayons cosmiques n’ont montré aucune tendance significative, de sorte que cet épisode de réchauffement doit avoir une autre source. »
Dans les faits, un certain nombre de mesures indépendantes de l’activité solaire indiquent que le soleil affiche une légère tendance au refroidissement depuis 1960, soit durant la même période où les températures mondiales ont augmentées. Au cours des 35 dernières années de réchauffement planétaire, le soleil et le climat ont donc évolué dans des directions diamétralement opposées. Au contraire, une analyse des températures solaires a conclu que le soleil a contribué à un léger refroidissement de la Terre au cours des dernières décennies (Lockwood, 2008). Il est donc prouvé que le soleil n’est pas responsable du réchauffement climatique en cours.
Quel est l’impact du CO2 sur le climat ?
Les changements climatiques qui eurent lieu à des époques antérieures à la nôtre peuvent s’expliquer par des causes naturelles, tandis que le changement climatique actuel ne peut s’expliquer que par un excès de CO2 libéré par la production humaine de combustibles fossiles. Les archives climatiques passées indiquent que les changements se sont produits sur des échelles de temps allant de plusieurs milliers à des dizaines de millions d’années. L’augmentation globale de la température qui s’est produite au cours des 150 dernières années est sans précédent et nous en sommes responsables.
Pour remettre en question la réalité du changement climatique, des climato-sceptiques s’appuient sur le fait que le climat change constamment, que nous avons connu des périodes glaciaires et des périodes plus chaudes, malgré des niveaux de CO2 inférieurs à ceux d’aujourd’hui. Plus récemment, l’humanité à traversé une période de réchauffement au Moyen-Âge et un petit âge glaciaire. Pourtant, le réchauffement climatique tel qu’observé depuis la révolution industrielle ne peut s’expliquer que par l’excès de CO2 relevé dans l’atmosphère. Et cet excès de CO2 ne peut s’expliquer que par des sources humaines. Examinons d’abord le réchauffement postérieur à la révolution industrielle et certains des signes révélateurs de la responsabilité de l’homme.
L’empreinte humaine dans le réchauffement climatique
Comment être sûrs que les rejets de gaz à effet de serre issus de l’activité industrielle sont à l’origine de la hausse observée de la température mondiale ? Tout d’abord, nous examinerons les preuves qui démontrent que les gaz à effet de serre sont à l’origine du réchauffement actuel. Puis nous verrons comment nous savons que la récente augmentation des gaz à effet de serre est due à l’activité humaine.
Le phénomène des gaz à effet de serre est assez bien compris, ce qui nous permet de faire des prédictions sur ce que nous devrions observer s’il n’y avait pas d’activité industrielle sur la planète. Lorsque le CO2 est ajouté à l’atmosphère, il entraîne un réchauffement de la basse atmosphère (c’est-à-dire de la troposphère, où nous vivons). Ce réchauffement se produit parce que le CO2 ajouté piège la chaleur infrarouge émise par la surface chaude de la Terre – une chaleur qui, autrement, s’échapperait dans l’espace. En revanche, dans la stratosphère, au-dessus de la troposphère, l’ajout de CO2 entraîne son refroidissement. Cela s’explique par le fait que le CO2 supplémentaire dans la stratosphère émet davantage de chaleur en direction de l’espace. Or nous savons que la stratosphère s’est refroidie au cours des dernières décennies, à mesure que le CO2 atmosphérique augmentait. Cela exclut également le soleil, car une augmentation de l’énergie solaire réchaufferait l’ensemble de l’atmosphère.
Un autre exemple, prédit par Arrhenius en 1896, indique que les hivers devraient se réchauffer davantage que les étés. Les hémisphères reçoivent moins de lumière solaire en hiver et se refroidissent en rayonnant l’énergie vers l’espace. Si les gaz à effet de serre augmentaient, ils empêcheraient une partie de cette énergie de s’échapper, réchauffant ainsi l’hémisphère hivernal. Il était prévu que l’effet de réchauffement de l’hiver soit plus important que celui de l’été. Là encore, c’est ce que l’on observe.
Le sophisme de la cause unique
Examinons maintenant les croyances des climato-sceptiques d’un peu plus près. Afin de semer le doute sur la légitimité du CO2 comme moteur du changement climatique, les sceptiques émettent l’hypothèse que le changement climatique actuel serait naturel, parce que le climat a changé naturellement dans le passé. Cette idée fausse repose sur une hypothèse incorrecte. Elle part du principe que, puisque le climat a déjà changé de façon naturelle, il ne peut que changer de façon naturelle aujourd’hui. C’est ce qu’on appelle le sophisme de la cause unique. Comme son nom l’indique, il s’agit d’un phénomène faussement attribué à une cause unique, même si d’autres causes sont possibles. C’est comme si quelqu’un prétendait que le tabagisme ne peut pas causer le cancer simplement parce que les gens contractaient le cancer avant l’invention de la cigarette. Ce qui est un raisonnement illogique et stupide.
Pourquoi la Terre se réchauffe ?
La température moyenne de la Terre dépend de l’équilibre entre « l’énergie entrante » et « l’énergie sortante ». L’énergie entrante est émise par le soleil, et l’énergie sortante est celle que la surface de la Terre renvoie dans l’espace. Si les radiations entrantes et sortantes sont égales, la température globale reste la même. Mais si la quantité de rayonnement entrant ou sortant change, la température de la Terre augmente ou diminue lentement, jusqu’à ce qu’un nouvel équilibre soit atteint. Les gaz dits « à effet de serre » – comme le CO2 – piègent le rayonnement à la surface de la Terre, réduisant ainsi la quantité d’énergie sortante. Or, en réduisant l’énergie sortante, tandis que l’énergie entrante demeure la même, on se retrouve naturellement avec plus d’énergie entrante que d’énergie sortante. Afin d’atteindre un nouvel équilibre, la planète va donc devoir se réchauffer jusqu’à ce qu’elle émette suffisamment d’énergie pour rétablir l’équilibre.
Pourquoi c’est une catastrophe planétaire ?
Ce processus d’équilibre énergétique prend environ quelques milliers d’années à se stabiliser. Comment expliquer que certaines époques antérieures, comme le Pliocène par exemple, aient été plus chaudes qu’aujourd’hui si le niveau de CO2 était équivalent ? Lorsque nous examinons les relevés de température (par exemple dans des carottes prélevées dans la glace), des milliers ou des millions d’années qui nous ont précédé, nous recherchons des valeurs où la Terre était en équilibre énergétique. À l’époque actuelle, nous savons que la teneur en CO2 de notre atmosphère a augmenté de plus de 40 % en un peu moins de 150 ans. Nous sommes donc toujours dans une phase de déséquilibre et il faudra certainement plusieurs centaines voir des milliers d’années pour rétablir l’équilibre entre l’énergie entrante et l’énergie sortante (cf. paragraphe précédent). Cela signifie que même si le CO2 cessait d’augmenter maintenant, cela ne changerait rien car nous avons déjà verrouillé le phénomène de réchauffement progressif pour les centaines d’années à venir.
2. Y a-t-il un consensus scientifique sur le réchauffement planétaire ?
Selon de multiples études, 90 à 100 % des climatologues s’accordent à dire que l’homme est à l’origine du réchauffement de la planète, et plusieurs études convergent vers un consensus de 97 % (cf. paragraphes suivants). Cette position est également approuvée par les académies des sciences de 80 pays à travers le monde, ainsi que par de nombreuses organisations scientifiques qui étudient la science du climat.
Malgré cela, un projet de pétition qui a réuni près de 31 000 scientifiques affirmait qu’ « il n’existe aucune preuve scientifique convaincante que les émissions de dioxyde de carbone par l’homme provoqueront, dans un avenir prévisible, un réchauffement catastrophique de l’atmosphère terrestre. »
Une enquête de Skeptical Science, évaluée par des pairs, portant sur tous les articles scientifiques traitant du « changement climatique mondial » et du « réchauffement climatique » publiés entre 1991 et 2011 (John Cook et alia., 2013) a révélé que plus de 97 % des textes prenant position sur le sujet étaient d’accord le consensus selon lequel les humains sont à l’origine du réchauffement climatique.
De nombreuses études rejoignent le consensus mondial
Les décideurs politiques et les médias, notamment aux États-Unis, affirment fréquemment que la science du climat est très incertaine. Certaines entreprises dont les revenus pourraient être affectés par des contrôles sur les émissions de dioxyde de carbone ont également allégué des incertitudes majeures dans la science du climat, allant jusqu’à financer des campagnes de désinformation sur ce sujet. Ces déclarations suggèrent qu’il pourrait y avoir un désaccord de fond au sein de la communauté scientifique sur la réalité du changement climatique anthropique. Or, ce n’est absolument pas le cas !
Une étude approfondie de tous les résumés évalués par des pairs sur le sujet du « changement climatique mondial » publiés entre 1993 et 2003 démontre que pas un seul ne rejette la position du consensus selon laquelle le réchauffement climatique est causé par l’homme (Oreskes, 2004). 75 % des articles étaient d’accord avec la position du consensus, tandis que 25 % ne faisaient aucun commentaire (portant sur les méthodes ou l’analyse des paléoclimats).
Rupert Darwall, David Henderson, Nigel Lawson, Peter Lilley, Benny Peiser et Matt Ridley, six climato-sceptiques américains, ont répété l’enquête d’Oreskes et affirmé avoir trouvé 34 études évaluées par des pairs qui rejetaient le consensus. Cependant, une inspection approfondie de chacune de ces 34 études révèle que la plupart d’entre elles ne rejettent en rien le consensus. Les autres articles visés par cette « pseudo-enquête » étaient de simples éditoriaux ou des lettres, et non des études évaluées par des pairs. Bien que l’association française des « climato-réalistes » (www.climato-realistes.fr) continue de citer Benny Peiser pour légitimer la diffusion de fake news à ce sujet, il est intéressant de noter que ce dernier s’est depuis rétracté de sa critique de l’enquête d’Oreskes, approuvant le consensus scientifique mondial au sujet de l’origine anthropique du réchauffement climatique :
Seuls quelques résumés rejettent explicitement ou mettent en doute le consensus sur le réchauffement climatique anthropique, ce qui explique pourquoi j’ai publiquement retiré ce point de ma critique. [Je ne pense pas que quiconque mette en doute le fait que nous soyons dans une période de réchauffement climatique. Je ne doute pas non plus que l’écrasante majorité des climatologues soit d’accord pour dire que la période de réchauffement actuelle est principalement due à l’impact humain. »
Benny Peiser.
3. Refroidissement planétaire : le réchauffement global est-il toujours d’actualité ?
Les mesures empiriques de la température de la Terre montrent que notre planète continue à accumuler de la chaleur et que le réchauffement climatique se poursuit. À court terme, les températures de surface peuvent présenter un refroidissement lorsque la chaleur est échangée entre l’atmosphère et l’océan, dont la capacité thermique est bien supérieure à celle de l’air. Mais ce refroidissement ne sera que de courte durée.
Selon certaines figures influentes du mouvement climato-sceptique, comme le physicien Danois Henrik Svensmark, le réchauffement climatique se serait arrêté et un refroidissement serait en train de s’amorcer. Selon ses propos, toutes les projections du climat futur, si elles ne prennent pas en compte un tel refroidissement, ne sont pas fiables. Or, cette affirmation est absolument fausse !
Affirmer un refroidissement, c’est nier la physique !
Qu’un scientifique, qui plus est physicien, puisse affirmer que nous connaissons actuellement un refroidissement global est une aberration ! En effet, car une telle allégation ignore une simple réalité physique : les terres et l’atmosphère ne représentent qu’une petite fraction du climat de la Terre (bien que la partie terrestre soit celle que nous habitons). Par définition, le réchauffement climatique est mondial. La planète entière accumule de la chaleur en raison d’un déséquilibre énergétique. L’atmosphère se réchauffe. Les océans accumulent de l’énergie. Les terres absorbent de l’énergie et la glace absorbe de la chaleur pour fondre. Pour avoir une vision complète du réchauffement climatique, il faut considérer l’ensemble du contenu thermique de la Terre. Car si l’on se concentre uniquement sur les températures de l’air en surface des zones habitées, on occulte plus de 90 % du réchauffement global de la planète (cf. schéma ci-dessous).
Illustration : Réchauffement climatique : où va la chaleur ? (Petra Boeckmann).
La température de surface, une donnée essentielle pour comprendre le climat
En étendant l’analyse de D.M. Murphy et alia. (2011), John Alexander Church, un expert du niveau de la mer et de ses changements et l’auteur principal du chapitre sur le niveau de la mer dans le troisième rapport d’évaluation du GIEC, a calculé le contenu thermique total de la Terre. Ses recherches qui combinent les mesures de la chaleur des océans, du réchauffement des terres et de l’atmosphère, ainsi que de la fonte des glaces, ont permis de prouver que notre système climatique ne cesse d’accumuler de la chaleur, qu’il y ait ou non un refroidissement.
En 1998, un El Niño anormalement fort a provoqué un transfert de chaleur de l’océan Pacifique vers l’atmosphère. Par conséquent, nous avons connu des températures de surface supérieures à la moyenne. À l’inverse, ces dernières années ont connu des conditions modérées qui ont eu un effet de refroidissement sur les températures mondiales. En 2015, nous sommes revenus à des conditions El Niño plus chaudes. Cela a coïncidé avec les températures de surface de la mer les plus chaudes jamais enregistrées jusqu’alors.
Tout récemment l’été 2022 a été le plus chaud jamais enregistré en Europe, selon le programme européen Copernicus. Les températures moyennes ont été « les plus élevées, à la fois pour le mois d’août et l’été entier », dépassant de 0,4 °C celles de 2021, précédent seuil critique, souligne l’étude. Cette variation interne où la chaleur se déplace dans notre climat est la raison pour laquelle la température de surface est une donnée cruciale pour comprendre le mécanisme du réchauffement climatique mondial.
4. Les animaux et les plantes pourront-ils s’adapter au réchauffement planétaire ?
Ainsi que nous avons tenté de le démontrer dans les paragraphes précédents, le changement climatique causé par l’homme se produit bien trop rapidement pour que les espèces puissent s’y adapter. Les écosystèmes animaux et végétaux meurent actuellement à un rythme 100 à 1000 fois plus rapide que le taux moyen d’extinction sur les échelles de temps géologiques ! Pour cette raison, il y a de plus en plus de preuves que nous nous dirigeons vers une extinction massive des espèces, la nôtre y compris. Malgré ce fait indéniable, de nombreux désinformateurs climato-sceptiques continuent de prétendre que les animaux, les arbres, les oiseaux, les mammifères et les insectes s’adapteront bien à la réalité du changement climatique, ou que la Nature est plus forte que les humains ou, pire encore, que la Terre serait un énorme être vivant (certains complotistes vont même plus loin en l’affublant du grotesque patronyme Gaïa) doué de raison… Loin de ces considérations ésotériques il y a la science et les faits. Et c’est de ces derniers dont nous vous parlons ci-après.
Les cinq extinctions massives de l’histoire de la Terre
Ainsi que la plupart des extinctions de moindre ampleur, les cinq extinctions majeures de l’histoire de la Terre ont toutes été provoquées par des changements climatiques majeurs et rapides. Lorsque le climat change trop rapidement pour que les espèces puissent s’adapter, des extinctions sont inévitables. La figure ci-dessous montre les phénomènes d’extinction antérieurs à notre époque.
La plupart des extinctions ont été liées à d’immenses événements volcaniques, appelés éruptions de grandes provinces magmatiques (LIP). Ces événements cataclysmiques furent à l’origine du rejet de milliards de tonnes de dioxyde de carbone (CO2) et de dioxyde de soufre (SO2) dans l’atmosphère, déclenchant dans de nombreux cas l’anoxie marine (perte d’oxygène) et l’acidification des océans due au réchauffement rapide de l’effet de serre. Parmi les cinq grandes extinctions de masse, l’événement survenu à la fin du Crétacé et qui a entraîné l’extinction de tout le règne animal et végétal de la planète, a été principalement causée par une importante frappe météorique suivi d’une éruption volcanique d’un super-volcan de la taille du continent Indien ! Dans tous les cas, les niveaux respectifs de pics de CO2 à ces époques lointaines (et qui ont déclenché ces extinctions massives) s’avèrent être bien moindres que les niveaux enregistrés actuellement…
À titre d’exemple, la plus grande des extinctions de masse, l’extinction du Permien (également appelée Grande Mort), laquelle à entraîné la disparition de près de 80 % de toutes les espèces à la fin de l’ère permienne, il y a 252 millions d’années. Au cours de cet événement, qui a été déclenché par une éruption volcanique gigantesque dans l’actuelle Sibérie, les températures mondiales se sont réchauffées de près de 10°C et les océans du monde ont perdu jusqu’à 80 % de leur teneur en oxygène. Or on estime que cette éruption, qui a connu des hauts et des bas pendant environ 2 millions d’années, a libéré jusqu’à 106 000 gigatonnes (Gt) de carbone dans l’atmosphère, soit… 14 fois moins de carbone que notre taux d’émission actuel (9,9 Gt/par an). Plus inquiétant encore, les projections actuelles montrent que les émissions mondiales ne vont faire qu’augmenter dans un avenir proche.
Affirmer que le changement climatique est « normal » est une assertion factuellement fausse
Un mythe récurent des sceptiques du climat prétend que ce réchauffement est normal, car les animaux et les plantes se sont adaptés à des variations de concentration de CO2 ou de température d’une ampleur similaire, voire supérieure. Par exemple, les dinosaures ont prospéré alors que les niveaux de CO2 étaient beaucoup plus élevés qu’aujourd’hui, dans un monde sans glace où le niveau des mers était plus élevé. Cette croyance est erronée parce que ce n’est pas tant le niveau de CO2 qui est nuisible, ni même les changements lents du climat qui se déroulent progressivement sur des millions d’années. C’est lorsque le CO2, et par conséquent le climat, changent si brusquement que la vie est incapable de s’adapter suffisamment rapidement. Lors de l’extinction massive de la fin du Permien, les niveaux de CO2 sont passés d’environ 500-800 ppm avant l’extinction à environ 4 400 ppm en l’espace de 40 000 ans environ.
Lorsque les climato-sceptiques affirment que les espèces seront capables de s’adapter au changement climatique actuel parce qu’elles se sont adaptées à des changements climatiques dans le passé, ils commettent l’erreur de la fausse équivalence. En effet, il est faux de comparer la façon qu’ont les espèces de s’adapter à des changements climatiques graduels (comme les cycles glaciaires) à la façon dont elles s’adapteront à des changements futurs causés par l’homme, car ils se déroulent sur des échelles de temps incomparables. Comparer un changement climatique rapide, causé par l’homme, au changement climatique lent et naturel est insensé. Hélas, convaincus de leur croyances, les climato-sceptiques ne s’encombrent que rarement de ces contradictions.
Des mesures de terrain effectuées au sud-est de l’Australie appuient et précisent le rôle du volcanisme, en particulier celui des émissions de gaz soufrés, dans l’extinction de masse survenue à la limite Permien-Trias.
Les changements climatiques s’étendent sur des dizaines de milliers d’années
La plupart des grandes variations naturelles de la concentration de CO2 se sont produites sur des dizaines ou des centaines de milliers d’années, voire plus. Par exemple, les périodes de grande glaciation et les périodes chaudes s’étalent sur environ 10 000 ans, avec un réchauffement total pouvant atteindre 6 °C dans chaque cycle. En comparaison, les modèles climatiques les plus récents prévoient que les températures moyennes mondiales se réchaufferont de 2 à 6 °C au cours des 100 prochaines années en raison du changement climatique anthropique. Ce taux de réchauffement actuel s’avère donc 20 à 60 fois plus rapide que le taux de réchauffement naturel après les périodes glaciaires qui ont ponctuées notre histoire. Les changements actuels de la concentration de CO2 et de la température moyenne mondiale dus aux émissions humaines se produisent trop rapidement pour que les plantes et les animaux puissent s’adapter. Pour utiliser une analogie : la plupart des espèces ont peut-être été capables de flotter à travers les vagues peu profondes de la variation naturelle du climat, mais elles ne sont aucunement préparées pour affronter le tsunami climatique à venir.
Les perspectives concernant la biodiversité de la Terre sont déprimantes
En résumé, nous savons que la plupart des extinctions massives recensées dans les archives fossilisées ont été déclenchées par l’apparition rapide d’un réchauffement climatique dû à une augmentation des émissions de dioxyde de carbone dans l’atmosphère. Dans le passé, ces émissions étaient généralement dues à de grands épisodes volcaniques qui se sont produits sur des dizaines ou des centaines de milliers d’années. À l’échelle des temps géologiques, ces changements se produisaient en un clin d’œil, ce qui explique leur impact énorme sur les écosystèmes. Or le changement climatique d’origine humaine qui se produit aujourd’hui est en tout point similaire : depuis 1850, nous avons augmenté les niveaux de CO2 dans l’atmosphère, qui n’ont jamais été aussi élevés au cours des 3 à 5 derniers millions d’années.
L’homme modifie le climat de la Terre plus rapidement que les animaux et les plantes ne sont capables de s’adapter, et une multitude de preuves indiquent qu’une sixième extinction de masse va se produire. En 2017, des chercheurs américains et mexicains évoquaient « un anéantissement biologique », avec une « défaunation » aux conséquences « catastrophiques » pour les écosystèmes et aux impacts écologiques, économiques et sociaux majeurs.
Même si ce constat est alarmant, il y a encore de l’espoir. Il est encore possible d’inverser les pires effets du changement climatique anthropique, et pour ce faire, nous devons soutenir les efforts de conservation, passer aux énergies renouvelables et abandonner notre dépendance aux énergies fossiles. Tout au long de l’histoire de l’humanité, notre existence a dépendu de la biodiversité de la Terre. C’est maintenant à notre tour de la sauver !
5. Est-ce que le continent Antarctique gagne de la glace ?
Selon une rumeur bien ancrée chez les climato-négationnistes, le dérèglement climatique planétaire serait une fraude. En cause, un article de 2015 et des images satellites de la NASA qui auraient confirmé que l’Antarctique gagne de la glace plus qu’elle n’en perd. Selon Jay Zwally, l’auteur de cette étude, cette affirmation est purement mensongère. Explications.
Cette fausse information s’appuie donc sur un article – par ailleurs fort contesté par les climatologues – relayé par l’agence américaine de recherche aéronautique en 2015, qui expliquerait que « l’Antarctique gagne 112 milliards de tonnes de glace par an ». Or ces allégations sont fausses. Au contraire, la NASA a depuis confirmé que ses satellites montrent que l’Antarctique a perdu de sa masse de glace depuis 2002, rappelant que le dérèglement du climat est une réalité.
En outre, il existe aujourd’hui un consensus mondial autour de la réduction de la masse de glace de l’Antarctique. Ainsi que l’a assuré un porte-parole de l’institution américaine le 12 août 2022 : « les allégations véhiculées dans ces publications sur les réseaux sociaux ne sont pas exactes », précisant que « les données des satellites de la NASA montrent au contraire que les calottes glaciaires de l’Antarctique perdent de la masse depuis 2002 ».
Dans le communiqué de la NASA, le chercheur estimait déjà que la masse de glace de l’Antarctique finirait par se réduire, en quelques décennies (là où d’autres études estimaient que cette perte serait bien plus rapide). Cet article confirme l’idée, bien connue des spécialistes du climat, que le changement climatique est complexe et que toutes les régions du globe ne réagissent pas de la même manière au phénomène de réchauffement.
Glace terrestre ou glace de mer ?
L’Antarctique est un continent recouvert à 98 % de glace, entouré d’un océan dont la surface est en grande partie recouverte de façon saisonnière par la glace de mer. Les reportages sur la glace de l’Antarctique omettent souvent de reconnaître la différence fondamentale entre la glace de mer et la glace terrestre. La glace terrestre de l’Antarctique est la glace qui s’est accumulée pendant des milliers d’années sur la masse continentale de l’Antarctique sous l’effet des chutes de neige. Cette glace terrestre est donc en fait de l’eau de mer qui s’est évaporée puis est retombée sous forme de précipitations sur le continent. La glace de mer de l’Antarctique est totalement différente puisqu’il s’agit d’une glace qui se forme dans l’eau salée pendant l’hiver et qui fond à nouveau presque entièrement en été.
Une différence cruciale
Lorsque la glace terrestre fond et se déverse dans les océans, le niveau global des mers augmente sensiblement, selon le principe de la poussée d’Archimède. À l’inverse, lorsque la glace de mer fond, le niveau des mers ne change pas de manière mesurable, ainsi que le feraient des glaçons dans un verre d’eau. Logique.
Résumé de la situation actuelle concernant les tendances des glaces de l’Antarctique
Ainsi que nous l’avons précisé plus haut, la glace terrestre de l’Antarctique diminue à un rythme accéléré et contribue à l’élévation du niveau de la mer.
La glace terrestre de l’Antarctique diminue
Mesurer les changements dans la masse de glace terrestre de l’Antarctique a été un processus difficile en raison de la taille massive et de la complexité de la calotte glaciaire. Cependant, l’estimation la plus récente de l’évolution de la glace terrestre, qui combine les estimations de multiples chercheurs approches, est qu‘entre 1992 et 2017, les inlandsis de l’Antarctique ont globalement perdu 2 720 gigatonnes (Gt) ou 2 720 000 000 000 tonnes dans les océans, à un rythme moyen de 108 Gt par an (Gt/an). Comme une réduction de masse de 360 Gt/an représente une élévation annuelle moyenne du niveau de la mer de 1 mm, ces estimations équivalent à une augmentation du niveau moyen de la mer de 30 mm par décennie. Si l’on ajoute à cela la perte de glace terrestre du Groenland, cela représente environ 30 % de l’élévation moyenne mondiale du niveau de la mer observée au cours de cette période.
Si l’océan Austral se réchauffe, pourquoi la glace de mer de l’Antarctique augmente-t-elle ?
Longtemps utilisée par les climato-négationnistes pour tenter de démontrer que le réchauffement global serait faux, plusieurs facteurs contribuent à cet état de fait. L’un d’eux est la baisse des niveaux d’ozone au-dessus de l’Antarctique. Le trou dans la couche d’ozone au-dessus du pôle Sud a provoqué un refroidissement de la stratosphère (Nathan P. Gillett & David W. J. Thompson, 2003). Cela renforce les vents cycloniques qui tournent autour du continent antarctique (Thompson & Solomon, 2002). Le vent pousse la glace de mer, créant des zones d’eau libre appelées polynies. Un plus grand nombre de polynies entraîne une augmentation de la production de glace de mer (Turner et alia, 2009).
Les changements de la circulation des courants océaniques constituent un autre facteur. L’océan Austral se compose d’une couche d’eau froide près de la surface et d’une couche d’eau plus chaude en dessous. L’eau de la couche plus chaude remonte à la surface, faisant fondre la glace de mer. Cependant, lorsque la température de l’air se réchauffe, la quantité de pluie et de neige augmente également. Cela rafraîchit les eaux de surface, ce qui donne une couche de surface moins dense que l’eau plus salée et plus chaude située en dessous. Les couches deviennent plus stratifiées et se mélangent moins. La chaleur est moins transportée vers le haut à partir de la couche plus profonde et plus chaude. La fonte de la glace de mer est donc moins importante (Jinlun Zhang, 2007). Une augmentation de la fonte de la glace terrestre de l’Antarctique contribuera également à l’augmentation de la production de glace de mer (R. Bintanja, G. J. van Oldenborgh, S. S. Drijfhout, B. Wouters & C. A. Katsman, 2013).
La tendance à la croissance de la glace s’est inversée
Comme pour souligner les diverses influences qui contrôlent la glace de mer de l’Antarctique, ces derniers temps, la tendance à la croissance s’est fortement inversée. La croissance peut reprendre, ou l’étendue de glace peut continuer à diminuer. En résumé, l’interprétation selon laquelle il devrait y avoir un réchauffement ou un refroidissement de l’Antarctique est fallacieuse. Car la façon dont le réchauffement climatique affecte les différentes régions du monde est très complexe et ne saurait se résumer si aisément. Encore une fois, nous retrouvons là l’exemple parfait de la logique complotiste, qui est de répondre à de multiples questionnements par une explication simpliste et unique, sans jamais s’embarrasser jamais de faits ni de preuves contradictoires, encore moins de réflexions critiques.
Le scepticisme scientifique est sain
Dans les faits, la science est naturellement sceptique. Le véritable scepticisme consiste à examiner l’ensemble des preuves avant d’arriver à une conclusion. Cependant, lorsque nous examinons plus en détail de près les arguments exprimant le « scepticisme » climatique, nous observons souvent une sélection minutieuse des éléments de preuve et le rejet de toutes les données qui ne correspondent pas au discours souhaité. Cette « logique » qui n’a rien de scientifique s’appuie en réalité sur le biais de confirmation, également dénommé biais de confirmation d’hypothèse, le biais cognitif qui consiste à privilégier les informations confirmant ses idées préconçues ou ses hypothèses (sans considération pour la véracité de ces informations) et/ou à accorder moins de poids aux hypothèses jouant en défaveur de ses conceptions.
Cela n’est pas du scepticisme. C’est ignorer les faits et la science.
Enrichissons nos connaissances
Le Guide Scientifique du climato-scepticisme examine à la fois les preuves que l’activité humaine est à l’origine du réchauffement de la planète et les façons dont les arguments des « sceptiques » du climat peuvent induire en erreur en ne présentant que de petites pièces du puzzle plutôt que le tableau complet. Ce guide est disponible en plusieurs langues et vous pouvez télécharger la version Française sur le site Skeptical Science.
Sources :
- Skeptical Science – Site-ressource qui étudie en détail le scepticisme à l’égard du réchauffement planétaire et du changement climatique et qui y répond de manière factuelle et argumentée.
- ONERC – Observatoire national sur les effets du réchauffement climatique.
- Les impacts du changement climatique sur l’eau, EauFrance (consulté le 12/10/2022).
- L’océan, ralentisseur du changement climatique, The Green Political Foundation (2018).
- IPCC/GIEC – Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) est l’organisme des Nations Unies chargé d’évaluer la science liée au changement climatique.